Accompagnement des élèves

L’accompagnement des familles d’élèves allophones : comment mieux accompagner les familles pour une inclusion réussie des élèves allophones

30 / 06 / 2023 | Anaëlle Weiss

Objectifs :
• Comment inclure les élèves allophones ?
• Comment accompagner leurs familles ?

Mots-clefs : Familles, EANA, accueil, accompagnement, co-éducation

Compétences :
• Comprendre les codes de la scolarité en France
• Comprendre le français comme langue vivante et comme langue d’apprentissage
• Apprendre à se servir d’outils spécifiques conçus pour les EANA
• Comprendre ce qui se joue en classe : la pédagogie et les enseignements

Niveaux : Tous

Supports, outils et activités :
• Tous supports
• Outils spécifiques conçus pour les EANA

Auteur : Pascale JALLERAT, formatrice au CASNAV

Fiches en lien : L’accompagnement aux devoirs des EANA



LE BO n° 37 du 11 octobre 2012 stipule dès le début de la circulaire concernant la scolarisation des élèves allophones : « L’obligation d’accueil dans les écoles et établissements s’applique de la même façon pour les élèves allophones arrivants que pour les autres élèves. Cet accueil commence par une information claire et facilement accessible qui présente le système éducatif français, les droits et les devoirs des familles et des élèves ainsi que les principes qui régissent le fonctionnement de l’école. » et rappelle «  il est de la responsabilité de l’institution scolaire de mettre en place les conditions qui facilitent aux parents les démarches d’accès à l’école et leur implication dans la scolarité de leur enfant, condition de sa réussite.  »

On retiendra dès lors quatre principes concernant l’accueil et l’accompagnement des familles d’élèves allophones :
 L’obligation d’accueil
 L’information claire et facilement accessible du système éducatif français
 Droits et devoirs
 La coéducation pour la réussite des élèves

1/ L’obligation d’accueil


La notion d’accueil est relative à la culture de chacun.

Chez les uns, accueillir quelqu’un c’est recevoir et montrer quelques repères basiques. Pour d’autres, accueillir c’est accompagner non pas sur une plage horaire déterminée mais au fil du temps sur une semaine, un mois, un trimestre, une année.
Or l’accueil des familles des élèves allophones doit de faire sur une longue durée.

D’une part, en effet, les représentations culturelles et langagières sont différentes, d’autre part l’habitus scolaire peut être à l’opposé de la nouvelle réalité rencontrée (lieu, horaires, rythmes, travail, attentes, rôle de chacun …).
De plus les familles des EANA (élèves allophones nouvellement arrivés) sont la plupart du temps très inquiètes et se posent la question de l’adaptation de leur enfant dans un monde nouveau.

Nous nous devons donc d’être accueillants, bienveillants et surtout prendre du temps pour faire connaissance.
Il faut absolument éviter d’accueillir une famille entre deux portes (voir article « Tout le monde avait l’air pressé » des Cahiers pédagogiques n°558 de 2020) entre deux cours quand on manque de temps et que l’on a mille choses à faire.
Accueillir les familles des élèves allophones, c’est prévoir du temps, un lieu, une salle aménagée pour la réunion où chacun peut s’asseoir, recueillir la parole du personnel de l’établissement (laisser le temps nécessaire aux traducteurs qui accompagnent les familles de traduire), prendre des documents visuels laissés à disposition…

Enfin, ce que l’on entend par le terme même de famille n’est pas la famille à l’européenne : deux parents, un ou plusieurs enfants.
Il faut accepter la diversité : la famille recomposée, la famille réunie après de longues années (regroupement familial), la famille monoparentale, mais aussi la famille polygame, avec parfois de nombreux enfants, et surtout la famille élargie : de nombreux EANA vivent avec des tantes et des oncles qui bien souvent ne sont pas vraiment la tante ou l’oncle du jeune tels que nous l’entendons. Cela peut être une personne du village d’origine, une personne du parcours de migration…
L’important est de savoir qui est le responsable légal et faire connaissance avec cette personne.

L’objectif doit avant tout œuvrer à la construction d’une relation de confiance avec les familles d’élèves allophones. En effet, le premier contact avec l’institution scolaire conditionne la constitution d’un capital de confiance pour les parents et d’estime de soi pour l’élève. Or, les parents sont les garants de la continuité du parcours scolaire et engager avec eux une relation d’estime réciproque est un acte de reconnaissance de leur légitimité éducative (voir la Fiche repères pour l’inclusion des élèves allophones nouvellement arrivés en France sur le site Eduscol cité ci-dessous).

2/ L’information claire et facilement accessible sur le système français


Informer clairement les familles des élèves allophones est essentiel car cela leur permet dès le début de travailler avec les équipes éducatives pour la réussite des élèves.
Cette information a pour vocation d’expliquer le système scolaire ainsi que les différentes structures correspondant à la tranche d’âge des jeunes concernés mais aussi de rappeler les principes de l’école française : école gratuite, instruction obligatoire, en langue française et porteuse des valeurs de la République.

Pour cela, plusieurs documents peuvent être proposés :

Ils sont traduits en 15 langues et se composent de plusieurs pages :
 Bienvenue
 L’école française
 Votre enfant entre à l’école maternelle
 Votre enfant entre à l’école élémentaire
 Votre enfant entre au collège
 Votre enfant entre au lycée



Il s’agit de 4 courtes vidéos qui sont traduites en 10 langues
 La mission de l’école
 L’entrée à l’école, l’organisation de l’école primaire
 Le collège, le lycée et après
 L’organisation de la vie à l’école











Par ailleurs, quelques outils numériques comme les traducteurs en ligne peuvent faciliter la communication, par exemple pour des autorisations de sortie, des changements d’horaires, des prises de rendez-vous. Ils permettent de traduire l’essentiel des informations à transmettre aux parents et l’on peut d’ailleurs profiter de cette communication traduite pour travailler avec l’élève allophone.

Enfin, il est essentiel de mobiliser la dimension visuelle en insérant des icônes, des images surtout lorsque la réalité à laquelle on se réfère ne fait pas partie des pratiques culturelles des familles. Cela peut être le cas pour le vote des délégués de parents, les conseils de classe, les réunions avec les professeurs ou encore une sortie scolaire.

ATTENTION, cependant !
Lorsqu’un papier doit être signé, il faut que le responsable légal signe la partie en français. Il ne faut donc pas oublier de transmettre les deux versions de tels documents officiels : l’une en français et l’autre dans la langue de la famille.

Au-delà des supports papiers, nous pouvons aussi proposer la visite de l’établissement scolaire, un support vidéo sur une journée au collège ou au lycée montrant les temps forts ainsi que les lieux et activités des élèves. Beaucoup de parents n’ont pas de représentation claire de ce qui se pratique en cours, dans la cour, en EPS, en arts plastiques… et à la vie scolaire ….
Ce support vidéo peut être l’occasion d’un travail commun mené avec les EANA et leurs camarades de classes ordinaires.
On peut proposer cette vidéo intéressante sur une journée au collège en France :
Vies de collégiens sur TV5Monde enseigner le français.

3/ Les droits et les devoirs des élèves


Il faut avant tout comprendre que les droits et devoirs des uns et des autres peuvent varier d’un pays à un autre. Par exemple, en Allemagne, on peut manger en classe, et dans la plupart des pays limitrophes le voile est accepté…

Il nous faut donc non seulement être précis dans nos attentes mais aussi expliquer le pourquoi des règlements des établissements scolaires, dans une posture d’accompagnement et de bienveillance. Pour cela, nous pouvons regarder une vidéo de témoignages « L’école à la française vue par les étrangers ».

Il ne s’agit pas d’expliciter en une seule fois le règlement intérieur du lycée et du collège mais de poser un petit nombre de règles, d’exposer quelques droits et devoirs avec l’intention d’y revenir ensuite par différents biais : lors des réunions avec les parents, en classe avec les élèves.

  • Lors des réunions parents :

Nous pouvons utiliser la première page des livrets d’accueil du site Eduscol cités ci-dessus.
Il s’agira d’expliquer : « En France, l’école publique est gratuite et l’instruction est obligatoire » mais aussi « Les garçons et les filles étudient dans les mêmes classes et sont traités à égalité » et enfin « L’école publique est laïque : elle respecte les cultures, les langues et la religion de chacun. »
En effet, ces trois assertions sont pour certaines familles difficiles à comprendre ou à accepter.
 La première peut surprendre certaines familles qui viennent de pays où il faut payer l’école et où la restauration scolaire est gratuite, à savoir l’inverse de notre système.
 La deuxième va se heurter à un filtre culturel, à savoir l’égalité filles / garçons mais aussi l’habitude de la mixité en classe. Il nous faudra donc expliciter, insister avec bienveillance et rappeler les valeurs de la République.
 Enfin, la laïcité est un concept très difficile à comprendre et à intégrer. Certains peuvent la comprendre comme un rejet des religions et des cultures. Il nous faut donc en montrer d’abord les avantages.
La laïcité permet à chaque élève de bénéficier de l’égalité accordée à tous et évite toute forme de discrimination religieuse. L’école doit rester neutre et impartiale en matière de religion. C’est pourquoi il est interdit d’afficher et de porter des symboles religieux visibles comme les croix, les foulards ou les kippas…
Il nous faut aussi rassurer en rappelant qu’à la sortie de l’établissement ces interdictions n’ont plus lieu.
Enfin, dans certains cas, après discussion avec un médiateur traducteur, il ne faut pas hésiter à faire un rappel à la loi.

  • En classe, il est aussi important de travailler sur ces droits et devoirs.

On pourra mettre en place des ateliers de création d’affiches, de flyers en plusieurs langues, de fiches telles que « le règlement intérieur en 5 points » puis « le règlement intérieur en 10 points » élaborés par les élèves en français puis traduits en langues d’origine. On pourra proposer aux élèves de faire des exposés ou un mur d’exposition autour de l’égalité filles/garçons…

Par ailleurs les attentes réciproques des parents et des professeurs et des professeurs face aux parents peuvent être très différentes d’un pays à un autre.
En effet, dans certains, le champ de responsabilité professionnelle des enseignants est conçu de telle sorte qu’ils doivent intégralement assumer tout problème de comportement jusqu’à un châtiment corporel explicitement prévu et considéré comme légitime, le cas échéant.

Ainsi, quand les convoque, certains parents ne comprennent pas en vertu du principe selon lequel les écarts de comportements des élèves à l’école ne sont pas de leur ressort. Il faudra aussi lors d’une réunions parents / professeurs exposer clairement nos attentes tout comme celles que peuvent avoir les familles, et ce que les parents peuvent attendre de nous. Les élèves pourront dans cette perspective concevoir des affiches, des flyers, à présenter aux parents.

Enfin, le pôle « vie scolaire » est un inconnu pour la plupart des parents venant d’un autre système scolaire. Il est donc important d’inviter la ou le CPE afin qu’il présente ce qu’elle ou il fait et ses attentes, notamment sur les absence et retards.
On peut aussi utiliser la vidéo ARTE Karambolage : Le CPE (surtout le début).

De même, comprendre le carnet de liaison n’est pas simple pour ces parents. Il s’agit d’un outil propre au système français. Il nous faudra donc le présenter, l’expliquer et rappeler que l’élève doit toujours l’avoir sur lui. On pourra faire une note d’emploi explicative et visuelle.

4/ La coéducation


En France comme dans d’autres pays, la notion de coéducation est très importante mais elle n’est pas universelle.

Nous ne voyons de fait qu’assez peu les familles d’élèves allophones participer à la vie de l’établissement ou venir à des réunions comme les conseils des classes ordinaires et encore moins participer à l’élection des représentants des parents d’élèves. Certes, la barrière de la langue y est pour beaucoup mais ce n’est pas la seule raison.

Tout d’abord les familles d’élèves allophones ont souvent peur d’entrer dans les établissements scolaires. Il nous faudra donc créer un environnement accueillant en mettant en place des temps spécifiques destinés à expliquer le fonctionnement de l’école, les attentes et les procédures administratives. Dans le même but, on pourra exposer des affiches de bienvenue en plusieurs langues dès l’entrée du collège ou du lycée, créer un livret d’accueil propre à l’établissement (traduit en plusieurs langues par le personnel et/ou par les élèves).

Il est aussi important de faire visiter l’établissement et si besoin les installations sportives. De même, l’on peut inviter les parents à assister à un cours pour qu’ils comprennent ce qu’il se passe.

Par ailleurs rappelons que beaucoup d’établissements proposent des ateliers OEPRE : « Ouvrir l’école aux parents pour la réussite des enfants ».
Ces ateliers reposent sur trois principes :
 L’acquisition du français (comprendre, parler, lire et écrire)
 La connaissance des valeurs de la République et leur mise en œuvre dans la société française
 La connaissance du fonctionnement et des attentes de l’École vis-à-vis des élèves et des parents.
Ils ont pour principal objectif de favoriser l’intégration des parents d’élèves, primo-arrivants, immigrés ou étrangers hors Union européenne, volontaires, en les impliquant notamment dans la scolarité de leur enfant (voir le BO n°15 du 13 avril 2017.

Enfin, on peut envisager comme cela se fait dans le premier degré des sorties avec des parents accompagnateurs mais aussi de mettre en place des journées interculturelles où les parents jouent un rôle prépondérant : lecture de contes en langue d’origine et en français, présentation d’une langue, d’un pays, d’une culture…

accompagnement_des_familles_allophones.pdf